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"La promesse, je te promet" Livret en accordéon

La promesse, je te promets...

Lorsque le jeune Mohammed fêta ses 9 ans, il dut subitement quitter son pays d’origine, l’Afghanistan. Un jour quelconque, sa maman l’avait pris en aparté pour lui annoncer: “mon grand garçon, mon chéri, il est temps que je t’explique quelque chose qui ne va très certainement pas te plaire… Même moi je n’ai pas envie de te révéler ce que tu vas entendre, mais à présent, tu es un grand garçon et je sais que tu te montreras extrêmement courageux… Tu sais à quel point je suis fière de toi, mais dès demain, il te faudra quitter la maison, ta famille, ton pays. Avant de me dire quoi que ce soit, je veux que tu m’écoutes attentivement, du début à la fin…”
Elle avait précisé ensuite: “sache que ta maman t’aime d’un amour véritable et infaillible, garde bien cela au fond de ton cœur et de ta mémoire !”
La femme, prenant une profonde respiration, avait lancé à son fils: “comme tu le sais, nous sommes en guerre depuis tant d’années maintenant, et la façon dont notre pays gère ces conflits est catastrophique… Et, en tant que mère, je souhaite le meilleur pour toi, une vie paisible où jamais tu ne serais dans le besoin ni en danger ”
Mohammed écoutait sa mère, suspendu à ses lèvres. Elle avait continué en disant: "Te souviens-tu de mon amie Léa ? La dame qui habite en Belgique? Hé bien, elle t’accueillera chez elle, te considérera comme son propre fils pour que tu puisses construire une vie meilleure qu’ici. Tu vas devoir effectuer ce long voyage seul afin de pouvoir la rejoindre…”
À ce moment-là, le jeune garçon complètement abasourdi par ce qu’il venait d’apprendre, avait rétorqué : “mais pourquoi tout seul, Maman ? Viens avec moi!”
“Je ne pourrai pas t’accompagner, Mohammed… Pas pour le moment” avait-elle adressé à son fils, les larmes aux yeux. “Je n’ai, hélas, pas assez d’argent pour pouvoir t’accompagner, pas pour le moment; tu es ma priorité, je veux à tout prix ta sécurité. Mais je te promets que dès que tu seras là-bas, en Belgique, auprès de mon amie, je te le jure, on se retrouvera, je ferai tout pour te rejoindre au plus vite!”
“Là-bas, tu seras scolarisé, tu suivras des cours, tu te retrouveras en classe avec d’autres élèves, de nouveaux amis, puis tu réaliseras des études; c’est tout ce dont tu as toujours rêvé, non ?” lui avait demandé sa maman.
Le garçon avait répondu : ”oui, Maman, j’en ai toujours rêvé, j’ai toujours eu très envie d’apprendre, de suivre des leçons, … Je te promets, Maman: quand j' serai grand, je gagnerai énormément d’argent pour toi !”
La femme, dans un sanglot, avit répondu à cela : “je suis extrêmement fière de toi, mon fils. Je sais que tu es capable de t’en sortir!”
Elle l’avait ensuite embrassé, pris dans ses bras en lui glissant à l’oreille: “Léa va bien s'occuper de toi, elle me l’a promis. C’est une personne très généreuse et digne de confiance; elle m’a juré de te considérer comme l’enfant qu’elle a toujours désiré.”
Ce jour-là, Mohammed s’était montré très courageux pour ne pas inquiéter sa mère. En vérité, il était terrifié. Cette nuit-là, il ne put fermer l’œil tant ses mains tremblaient et son cœur battait bien plus vite qu’à l’ordinaire… L’angoisse de devoir faire ses adieux à sa mère, à ses proches, … Et cette panique qui l’envahit à l’idée de devoir quitter son pays et entamer seul ce long périple…”. Le garçon finit par s’assoupir, totalement inquiet et chamboulé.
Le lendemain, le jeune garçon se réveilla en sursaut, en identifiant la voix de sa maman provenant du rez-de-chaussée. 
Il descendit les quelques marches les yeux à peine ouverts et rouge de sang, tellement la nuit fut horrible.
Sa mère lui demanda de se hâter, d’aller s’habiller au plus vite pour ne pas manquer le départ du bateau. Celui-ci devait partir du village voisin. Elle poursuivit, totalement stressée: “ je t’ai préparé un sac à dos, il y a un peu d’argent et quelques affaires de rechange dedans. Garde toujours un œil dessus car tu vas te retrouver avec d’autres personnes, des hommes, femmes et enfants: ne te le fais surtout pas voler!”
À 4h pile du matin, la mère et son fils se retrouvèrent au port du village voisin. Devant eux, un seul petit bateau pour une cinquantaine de passagers… .
Le bateau prit les vagues quelques minutes plus tard, le fiston eut à peine le temps d’embrasser sa mère. Sur l’embarcation, tout le monde était entassé, impossible de bouger.
Les minutes s'écoulaient comme des jours, cela lui semblait tellement long… Mohammed était mort de fatigue. Il finit par s’endormir. Après deux ou trois heures, il fut réveillé par d’importantes secousses et des hurlements : les gens étaient pris de panique, le bateau remuait dans tous les sens, et le garçon se trouvait piétiné par certains passagers.
Par le hublot, il aperçut un ciel noir comme le charbon, on ne voyait même plus le soleil à travers tout cette masse de nuages ! La nuit tombait tout doucement, le bateau tanguait et l’eau salée envahissait peu à peu l’embarcation.
Tout à coup, le garçon vit une énorme vague se jeter sur eux. Pris de panique, il ferma les yeux. Cette vague était si puissante qu’elle fit chavirer le bateau. Tous les passagers se retrouvèrent à l’eau... 
Lorsque Mohammed reprit ses esprits, il réalisa qu’il se trouvait seul dans une pièce, allongé sur un lit: tout était blanc autour de lui et il faisait terriblement froid. “Suis-je mort?” pensa-t-il. 
Quelques instants plus tard, une silhouette arriva à sa hauteur.  
Un homme imposant et barbu, tout vêtu de blanc commença à lui parler, mais le garçon ne saisissait rien de ce qu’il disait. Il comprit alors qu’il se trouvait hors de l’Afghanistan. L’homme tenta de se faire comprendre en faisant plusieurs mouvements lents avec ses bras, en vain. Il soupira puis quitta la pièce.
Une idée traversa l’esprit du jeune garçon, ou plutôt, son instinct de survie: Mohammed se leva d’un coup et se rua vers la porte. Il emprunta la sortie la plus proche pour s’enfuir de ce qui lui semblait être un hôpital. Il n’avait encore jamais vu autant de monde dans ce genre d’endroit; il y avait tous les âges, des plus jeunes au plus vieux… 
Soudain, il aperçut au loin une immense porte vitrée. En la franchissant, il arriva dans un endroit rempli de véhicules, de verdure, et de la foule un peu partout, avec des grands buildings autour.
“Où suis-je???” pensa-t-il tout haut. Mohammed ne savait pas du tout quelle direction prendre... C’est là qu’il repensa à cette petite feuille en papier que sa mère maman lui avait remis avant son départ… “C’est probablement l’adresse de Léa!”, s’illumina le jeune garçon qui reprit espoir. Il fouilla ses poches et sortit rapidement le bout de papier. Horreur, l’encre était délavée et le bout de papier partiellement déchiré… Impossible de déchiffrer le nom de la ville… 
A force d’errer dans cette ville inconnue des heures durant, le garçon attrapa des cloques au niveau des talons. Ses blessures le faisaient souffrir, il grimaçait à chaque pas. La nuit tombait, il commençait à faire vraiment froid. Il se dit, désespéré: “je n’ai plus rien sur moi à part les vêtements que je porte et ce bout de papier complètement inutile. J’ai perdu mon sac à dos certainement depuis que je suis tombé à l’eau.”
Exténué, il s’effondra dans une ruelle entre deux containers pour se protéger du courant d’air. Il s’endormit rapidement mais la vie dans cette ville commence assez tôt. 
Dès le beau matin, il fut surpris par le vacarme provoqué par un bouchon, tous ces véhicules qui klaxonnaient, tous ces passants qui défilaient… Des hommes et des femmes habillés de manière classe, en costard ou tailleur ajusté, en chemises assorties de vestes bien taillées... Et à leurs pieds, des paires de chaussures cirées, brillant de mille feux; on pouvait même voir le reflet du paysage s’y refléter…
“Cette vie est complètement hallucinante…” pensa le jeune garçon, à la fois impressionné et effrayé.
Il se leva tant bien que mal, et se dirigea vers un restaurant asiatique qu’il avait repéré juste avant. Il avait tellement faim qu’il décida de chercher après des restes de nourriture au fond des poubelles. Mohammed n’avait jamais agi de la sorte auparavant, sa mère avait toujours veillé à ce qu’il ne manque de rien, mais arrivé au bout de ses forces, cela ne le dégoûtait pas vraiment.
Lorsqu’il ouvrit une énorme poubelle métallique, il perçut une odeur à la fois forte et en même temps alléchante. Dedans se trouvait le reste d’une cuisse de poulet. Mohammed s’en emprara, mangea goulûment, se léchant les doigts pour ne rien gaspiller de la marinade. 
Soudain, une porte s’ouvrit brusquement, le garçon sursauta. Un homme surgit et s’arrêta net en le voyant. “Un cuistot semblerait-il”, pensa Mohammed, craintif. L’adulte l’observait avec pitié en découvrant la scène. Il retourna les talons et réapparut 30 secondes plus tard, accompagné de deux hommes. Ceux-ci transportaient une chaise, une petite table de bistro, et le cuistot, lui, avait les bras chargés de plats. Ce dernier, parlant couramment le Patcho, commença alors à questionner le jeune garçon, lui demandant comment il en était arrivé là. Mohammed, mis en confiance par ce grand gaillard attentionné, lui raconta son périple tout en savourant le repas. L’homme lui posa de multiples questions et précisa qu’il pouvait rester là, jusqu’après son boulot. 
Une fois le service terminé, le cuistot lui proposa de l’emmener chez lui pour rencontrer sa femme. Mohammed ne s’y opposa pas; de toute façon, il n’avait nulle part où aller. L'homme, prénommé Frank, l’embarqua à bord d’une Ferrari 458 Italia. Mohammed n’en revenait pas! En rentrant dans le véhicule, le parfum du cuir et du luxe lui monta au nez; c’était si différent par rapport à l’odeur de vieux plastique qui embaumait la voiture de sa maman...
Frank n’habitait vraiment pas loin du restaurant, à peine 5 minutes de trajet. En arrivant chez lui, le garçon était bouche bée, impressionné par la grandeur et l’architecture de la villa qui trônait face à lui. Il n’avait jamais vu une maison aussi grande et luxueuse auparavant!
Une femme, qui les attendait sagement devant l’entrée, l’interpella : “Mohammed, c’est bien toi? Je suis Léa, l’amie de ta Maman!” 
Avant même qu’il ne réponde quoi que ce soit, elle se jeta vers le garçon et le prit dans ses bras. Elle le serrait tellement fort que Mohammed manqua de s’étouffer… 
“Comment vas-tu, Mohammed ? Tu es devenu si grand à présent !” lui demanda-t-elle, tout en l’emmenant à l’intérieur de la somptueuse demeure. 
Mohammed avait des étoiles plein les yeux en découvrant l’habitation: chez eux, tout était très luxueux, les matériaux utilisés étaient, pour la plupart, du marbre…
Léa et son époux invitèrent le gamin à s’attabler et ils s’installèrent face à lui. Ils posaient tellement de questions que Mohammed avait à peine le temps de terminer ses phrases. 
Léa, voyant le jeune garçon bâiller, lui proposa d’aller se reposer.



Trois années s’écoulèrent. 
Mohammed, adopté par ce couple que formaient Léa et Frank, était le plus heureux des enfants de son âge. A l’école, il était doué, et avait même été élu comme le meilleur élève de son établissement. Chaque semaine, il prenait soin d’écrire à sa Maman pour lui faire part de ses exploits. Malheureusement, seule ombre au tableau: depuis que le couple l’avait pris sous son aile, le jeune adolescent n’avait reçu aucune nouvelle de sa véritable mère. Il regrettait tellement d’avoir perdu sa trace. Elle lui manquait terriblement. Léa et Frank avaient tenté de la contacter à plusieurs reprises, mais jamais elle ne s’était manifestée… Mohammed avait vite compris qu’il ne la reverrait jamais, elle qui lui avait sauvé la vie…
Un jour, en relevant le courrier, Mohammed découvrit une enveloppe en provenance d’Afghanistan, de son village d’origine… En l’ouvrant, la première chose qui lui sauta aux yeux, c’est qu’il ne s’agissait pas de l’écriture de sa mère.
Il s’agissait du nouveau propriétaire qui vivait dans son ancienne maison. Il expliquait dans sa lettre l’acquisition de cette maison, abandonnée mais  en très bon état. Il racontait les tas de lettres qui jonchaient le sol à son arrivée. Interpellé par cela, il avait mené son enquête dans le village. Malheureusement, on lui apprit finalement que l’ancienne résidente était décédée.
En parcourant ces derniers mots, Mohammed tomba au sol, des larmes ruisselaient sur ses joues. “Mma… Maman…” s’échappa doucement de ses lèvres entrouvertes.
Depuis ce jour-là, Mohammed redoubla d’efforts pour devenir encore plus performant à l’école. Il voulait à tout prix montrer à sa mère ce dont il était capable, et qu’elle ne s’était pas sacrifiée pour rien. Un jour ou l’autre, il l’aura ce super métier qui lui permettra de vivre aisément, comme elle le souhaitait tant! “Maman, je te le promets” pensa-t-il, le regard rempli de tendresse.
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